Certains milieux officiels et ceux qui leur sont apparentés ont beaucoup épilogué sur l’extradition de Laurent Nkunda à Kinshasa par Kigali. L’affaire a revêtu une importance telle que le président Joseph Kabila a été amené à se prononcer là-dessus au cours de sa dernière entrevue avec la presse, laissant entendre que des démarches discrètes seraient en cours. Les analystes politiques dépourvus de préjugés et de passion étaient sceptiques sur la réalisation du rêve caressé par d’aucuns de nos compatriotes. Ce scepticisme était fondé sur plusieurs facteurs objectifs, notamment les affinités qui unissaient le leader du CNDP et les dirigeants rwandais lorsqu’il faisait la pluie et le beau temps au Nord Kivu en communion d’idées avec Kigali ; l’absence de relations diplomatiques normales entre la RDC et la République du Rwanda ; la solidarité ethnique tutsie dont les membres de la communauté ne peuvent jamais se trahir où qu’ils se trouvent et quelles que soient les circonstances. En faisant entrer tous ces éléments d’analyse en ligne de compte, on ne peut s’empêcher d’assimiler l’importance attachée à l’extradition de Nkunda à une stratégie de diversion destinée à chloroformer l’opinion pour qu’elle soit absorbée par le secondaire et détournée de l’essentiel. Les tenants et les aboutissants de l’entrée officielle des fantassins rwandais au Nord Kivu sont plus préoccupants pour la plupart des Congolais, que l’extradition du leader du CNDP qui est en réalité l’accessoire. C’est le problème qui tourmente les députés nationaux signataires d’une pétition requérant la convocation d’une session extraordinaire de leur Chambre, pétition dont le promoteur est le député Kyaviro de la majorité, originaire du Kivu. Pour les « Honorables », Nkunda n’est que la partie émergée de l’iceberg dont l’extradition éventuelle ne peut en rien les distraire. Juste au moment où à Kinshasa on semblait se concentrer sur cette extradition, des nouvelles en provenance de Kigali n’incitaient pas du tout à l’optimisme.
Au cours d’une interview accordée à un organe de presse étranger, le président rwandais répondait récemment, à une question concernant cette affaire, que la solution du cas Nkunda devrait être plutôt politique que judiciaire. En d’autres termes, Kigali ne serait pas disposé à livrer Laurent Nkunda comme le gibier de potence. La solution politique sous-entend sa réhabilitation d’une manière ou d’une autre. Mais quel est ce plus grand des hasards qui fait défiler sur le sitewebcndp un document selon lequel que le gouvernement de la RDC se serait engagé à considérer désormais sans objet toutes les poursuites judiciaires entamées contre Laurent Nkunda ? Le document donne des références précises d’une lettre du ministre de la Justice Luzolo Bambi Lesse, adressée à son collègue Raymond Tshibanda de la Coopération Internationale et Régionale, avec copie pour information réservée au Procureur général de la République et à l’Auditeur général des FARDC. Le quotidien Le Phare s’est fait l’écho de ce document dans son édition du jeudi, reprenant toutes les références de la lettre diffusée sur le sitewbbcnd. Déficit de communication et politique de cachotterie La lettre précise que cette démarche témoigne du souci de « consolider la paix et d’assurer la concorde nationale ». C’est la solution politique qui l’emporte sur l’action judiciaire. Tout comme Kigali l’avait souligné dans l’interviewde Kagame. Soucieux d’équilibrer l’information pour l’accompagner d’un autre son de cloche du pouvoir, Le Phare affirme avoir tenté en vain d’entrer en contact avec les autorités qualifiées pour la confirmer ou l’informer. Si le contenu du document sitewebcndp s’avérait fondé, l’arrestation de Nkunda au Rwanda n’aurait été qu’une mascarade pour frapper les esprits et détourner l’attention de l’opinion de l’entrée des militaires rwandais au Kivu. Si les poursuites judiciaires en cours étaient effectivement arrêtées et devenues sans objet, que faudrait-il alors dire encore au peuple dont les oreilles ont été rebattues tous ces derniers jours des démarches d’extradition de Nkunda ? A cause du déficit de communication et de l’absence d’un mécanisme approprié de circulation de l’information à l’intention de l’opinion, des nouvelles qu’on considère parfois à tort comme des secrets d’Etat, s’ébruitent facilement à partir de l’extérieur grâce à divers canaux médiatiques, et produisent dans l’opinion nationale un mauvais effet psychologique. Le gouvernement devrait prendre soin de devancer les événements au lieu de les subir, les assumant après coup avec une attitude défensive et la version édulcorée des faits pour un secret d’Etat jusqu’à ce qu’elle avait transpiré de l’étranger. L’entrée officielle des militaires rwandais au Kivu s’est révélée une information normale qu’on aurait pu communiquer sous une forme habillée, que le Chef de l’Etat lui-même a confirmée plus tard au cours de sa conférence de presse. Il en est de même de l’arrêt des poursuites judiciaires engagées contre Nkunda. Le gouvernement avait tout avantage de prendre l’initiative d’annoncer cette nouvelle. La lettre du ministre de la Justice dont il est question est datée du 09 février 2009, diffusée sur le sitewebcndp le 12 février. C’est le CNDP qui devient la première source de sa divulgation à travers le monde. Comment a-t-il eu la primeur de la nouvelle jusqu’à la diffuser avec empressement sur son siteweb? C’est encore un mystère. Du rêve d’extradition de Nkunda, on en vient à l’arrêt des poursuites judiciaires entamées contre lui, tandis que Jean Bosco Ntanganda recherché par la CPI a encore le loisir de se sentir à l’abri de toute inquiétude et de dormir sur ses deux oreilles avec des étoiles brodées sur les épaulettes. La première représentation du film à peine tourné est troublante. A l’arrière-plan on entrevoit le concordat conclu entre Kinshasa et Kigali visant en apparence la liquidation des FDLR, mais dont les termes ne sont connus en RDC que des personnes qui auraient négocié et signé cet accord. Alors qu’en RDC cet accommodement est encore enveloppé de mystère que les représentants du peuple luttent pour percer par l’initiative d’une pétition exigeant la convocation d’une session extraordinaire, au Rwanda ce concordat n’est pas un secret d’Etat. Le parlement et le gouvernement sont en symbiose et en communion d’idées. Au cours d’une plénière, le ministre de la Défense a informé les parlementaires de l’évolution des opérations au Nord-Kivu. Ils en ont fait l’évaluation, s’en sont réjouis et ont convenu de prolonger ces opérations. Une solution politique en faveur de Laurent Nkunda et un sursis dont bénéficierait Jean Bosco Ntanganda, ne manqueraient pas de procéder d’une même source discrète. Tout comme la machination de déstabilisation de Kamerhe.
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