Ouganda, Rwanda, Burundi, Tanzanie et, désormais, Angola… Durant des années, trop préoccupé qu’il était par ses problèmes intérieurs, le Congo ne s’est guère soucié des ressources qu’il partageait avec les pays voisins, le gaz méthane, le diamant et surtout le pétrole. Aujourd’hui que les autorités de Kinshasa se réveillent, c’est pour s’apercevoir que, durant ces années perdues, les voisins ont avancé et entamé, de manière souvent unilatérale, la mise en exploitation des ressources communes.
Qu’on en juge : du côté rwandais, une plate forme d’extraction du gaz méthane a déjà été construite au milieu du lac Kivu et elle produit deux mégawatts d’énergie, qui alimentent la ville de Gisenyi. Un protocole d’accord sur l’exploitation du gaz méthane a certes été signé entre les deux pays, mais du côté congolais aucune initiative marquante n’a encore été prise.
Quant au diamant, c’est la même veine qui court sur la frontière entre le Congo et l’Angola du côté de Kahemba et un litige frontalier entre les deux pays a été soumis à l’arbitrage des deux anciennes puissances coloniales, le Portugal et la Belgique.
Actuellement, c’est le pétrole qui défraie la chronique et pourrait alimenter de futures tensions. En effet, d’énormes gisements de pétrole dorment dans le « Graben » africain, et en particulier dans les lacs Tanganyika et Victoria. La République démocratique du Congo disposerait de dix blocs sur le lac Tanganyika, de cinq sur le lac Albert. Ici aussi, les voisons vont de l’avant : sur le Tanganyika, la Tanzanie aurait accordé l’année dernière quatre licences d’exploitation à des sociétés britanniques et australiennes, les quatres blocs appartenant au Burundi sont en phase d’exploration (entre autres par British Petroleum). Quant à l’Ouganda, qui accueille déjà la société Héritage Oil, il vient de signer avec les Ecossais de Tullow Oil un accord qui devrait le propulser au premier rang des producteurs pétroliers africains, avec une réserve estimée, au minimum, à 400 millions de brut.
Du côté congolais, on affiche toujours une modeste production de 25.000 barils par jour, dont 10.000 sont extraits off shore, du côté de Moanda sur l’Océan Atlantique.
C’est là que la situation est la plus explosive : jusqu’à présent, Kinshasa se contentait d’un petit champ pétrolier off shore, d’une profondeur de 40 kilomètres, tandis que l’Angola devenait une puissance pétrolière grâce à l’énorme champ s’étendant sur tout le Golfe de Guinée, la valeur de l’espace maritime angolais étant estimée à 4 milliards de barils.
Or actuellement, le Parlement congolais ayant adopté la loi délimitant les frontières maritimes et terrestres du pays, Kinshasa revendique des eaux territoriales s’étendant sur 200 km 2. Des ambitions qui butent directement sur le fameux « bloc 15 », où des multinationales invitées par le gouvernement angolais exploitent 500.000 barils de brut par jour !
Selon le quotidien kinois « le Potentiel », la RDC invoque désormais la convention dite de Monte Globo qui donne droit à tout Etat ayant une zone côtière d’ouvrir une zone d’au moins 20 km de large et 200 km de long , au large des eaux faisant partie de sa zone territoriale soit, dans le cas congolais, 4000 km2 s’étendant entre l’enclave de Cabinda et le territoire angolais. D’ores et déjà, Exxon (40%) British Pétroleum (26,§%), Agip (20%) et Statoil (13,3%) sont présentes du côté angolais, ainsi que Chevron et Tullow Oil, qui se partagent une réserve de 400 millions de barils.
Le litige latent entre Kinshasa et Luanda pourrait être tranché via un arbitrage international, ou donner lieu à une solution à l’amiable, qui permettrait la création d’une zone d’intérêt commun. On n’en est pas là pour l’ instant : l’absence du président dos Santos, lors du dernier sommet de la SADC (conférence des Etats d’Afrique australe) qui s’est tenue à Kinshasa a été très remarquée tandis que, dans le Bas Congo, des irréguliers congolais et angolais ont été expulsés brutalement de part et d’autre de la frontière.
Pour Kinshasa, la question est également politique : au cours des dix dernières années, les forces armées angolaises, à plusieurs reprises, sont venues au secours du régime dans les circonstances les plus difficiles et il n’est pas certain que le Congo puisse prendre le risque d’engager un conflit d’ordre économique avec son puissant voisin…
Colette Braeckman
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